Discours d’ouverture de la session du conseil départemental de Meurthe-et-Moselle

Discours d’ouverture de la session par Mathieu Klein,

Président du conseil départemental en présence des membres du Conseil Départemental de la Citoyenneté et de l’Autonomie.

Lundi 26 juin 2017

Mesdames et messieurs les conseillères et conseillers départementaux, chers collègues,

Mesdames, messieurs les membres du Conseil Départemental de la Citoyenneté et de l’Autonomie,

Je souhaite la bienvenue aux membres du Conseil Départemental de la Citoyenneté et de l’Autonomie (CDCA) qui sont ce matin avec nous. Après les collégiens au printemps, nous avons beaucoup de plaisir à vous accueillir parmi nous, donnant ainsi davantage de place à la société civile pour élaborer des politiques publiques plus efficaces et plus pertinentes. Si nous voulons donner du sens à notre action ce sera moins par les discours descendants que par la participation et l’engagement que nous y parviendrons.

Cette démarche s’inscrit pleinement dans les objectifs du projet départemental qui prend appui sur l’écoute des usagers, sur l’implication des associations à la construction des politiques publiques. En matière de citoyenneté, l’expérience meurthe-et-mosellane a été observée de près, notamment lors de la conception des CDCA et plus globalement lors de l’élaboration de la loi pour l’Adaptation de la Société au Vieillissement.

Vous nous présenterez tout à l’heure votre avis avant l’adoption par l’assemblée du premier Schéma de l’autonomie en Meurthe-et-Moselle. Celui-ci conclut une séquence de co-construction, démarrée en 2016 et qui a mobilisé plus de 700 acteurs meurthe-et-mosellans dans l’ensemble du territoire. Je veux ici, en votre nom les remercier. Comme je tiens à saluer tout particulièrement l’investissement de la vice-présidente Annie Silvestri, qui a piloté la concertation et l’élaboration de ce schéma. Je veux ainsi souligner le travail de qualité réalisé par la direction de l’Autonomie, sous la houlette bienveillante et efficace de Marie-Annick Helfer, en lien avec les équipes territoriales.

En 2050, La France comptera 20 millions d’habitants de plus de 65 ans selon l’enquête INSEE de juin 2017. Les femmes et les hommes qui vivent avec un handicap accèdent et accèderont mieux encore à leurs droits de mener une vie digne.

La création de l’APA en 2002 avait marqué une étape essentielle dans la lutte contre les inégalités, qui se cristallisent dans le grand âge,

La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, et la loi plus récente du 28 décembre 2015 pour l’adaptation de la société au vieillissement constituent les deux piliers de l’engagement national dans le champ de l’autonomie.

La Meurthe-et-Moselle assemble, depuis le début des années 80, de multiples briques pour construire une réponse publique exigeante dans ce domaine :

  • Les premières Assises des retraités et personnes âgées ont eu lieu en Meurthe-et-Moselle en 1983.
  • La planification gérontologique date de 1984, bien avant l’obligation des schémas d’organisation sociale et médico-sociale.
  • La Prestation Spécifique Dépendance (PSD) a été élargie avant même la création de l’
  • Avant la CMU en 2000, la carte santé 54 créée en 1990 en coopération avec la Mutualité Française a permis aux Meurthe-et-Mosellans aux revenus modestes d’accéder à une couverture de santé complémentaire,
  • La création dès 2001 des six Points d’Accueil Information Services (PAIS) a préfiguré la large territorialisation des politiques de solidarité en Meurthe-et-Moselle.
  • D’autres étapes déterminantes ont également été franchies plus récemment sur le volet du parcours de soin et de l’accompagnement des personnes âgé Après le développement du projet MAIA (Méthode d’Intégration des services d’Aide et de soins dans le champ de l’Autonomie) par les services départementaux, ce fut au tour, dès 2012, du projet PAERPA (Personnes âgées en risque de perte d’autonomie) de connaître, sous la houlette de l’ARS et du conseil départemental, un déploiement progressif en Meurthe-et-Moselle.

Qui dit territorialisation dit démocratisation : grâce à l’accès aux droits en proximité et avec un niveau de dépense par habitant bien supérieur à la moyenne nationale :

  • 36/habitant en 2016 pour la PCH, 1er département au niveau de la dépense dans sa strate démographique (composée de 28 départements entre 500000 et un million d’habitants), la moyenne étant à 26€ ;
  • 100 /habitant en 2016 pour lAPA, la moyenne de la strate démographique étant à 88 €.

Aujourd’hui, malgré les contraintes financières de plus en plus lourdes, nous poursuivons toujours nos efforts pour simplifier les procédures. Les agents du département peuvent ainsi par exemple se déplacer au domicile des personnes, munies de tablettes et d’outils pour numériser sur place les différents documents.

Aussi, la convergence précoce en Meurthe-et-Moselle des services départementaux Personnes âgées et Personnes handicapées dans les territoires, a posé les jalons de l’approche globale de l’autonomie, sans gommer les différences, et désormais inscrite dans la loi et vous en êtes la meilleure traduction. Sans dénier les singularités du handicap et de l’âge, les problématiques communes créent des passerelles qui invitent à un rapprochement que symbolise précisément le Conseil Départemental de l’Autonomie et de la Citoyenneté installé le 7 avril 2017. Ce dernier fusionne désormais les instances représentatives et participatives des acteurs du handicap et des retraités et personnes âgées.

Je remercie chaleureusement les deux préfigurateurs, Marie-Thérèse ANDREUX et Louis BONET, pour leurs fonctions de facilitateurs à travers la richesse des acteurs. Car cette union des énergies est d’autant plus indispensable que bien des obstacles restent à lever sur le chemin d’une société réellement inclusive.

Implication dans la vie politique, changements des regards sur le handicap et la vieillesse, liberté de choix réel de son habitat, conditions de vie dignes, accès à l’information et à l’ensemble des droits ouverts à tout citoyen… voilà autant de chantiers qui restent ouverts et autant de marqueurs d’une société d’autonomie réelle. Ces thématiques sont par conséquent au cœur du premier Schéma de l’autonomie qui se veut attentif à tous les aspects de vie quotidienne : santé, mobilités, urbanisme, culture, loisirs, sports, emploi et formation, scolarisation, accessibilité…

Annie Silvestri vous détaillera les orientations retenues. Je voudrais pour ma part insister sur la notion d’innovation au service de l’autonomie.

Territorialisation, démocratisation et innovation, comme celle que portent en permanence les associations et acteurs de notre département. Je salue à ce titre l’Ecole de la vie autonome (OHS) dont nous accueillions avec plaisir une délégation de résidents pour cette session, comme je salue les différents précurseurs que nous avons dans ce territoire, l’AEIM et le projet de cité scolaire inclusive à Neuves-Maisons ou Espoir 54 qui a développé un des tout premiers Service d’Accompagnement à la Vie Sociale (SAVS) de France dès les années 2000….

Les enjeux de l’innovation sont tout autant sociaux, qu’économiques que financiers.

  • Enjeu social, car le maintien à domicile des personnes âgées et l’autonomie accrue des personnes handicapées est un facteur de qualité de vie. Le « vivre chez soi» est une profonde et légitime aspiration des personnes, comme l’a rappelé récemment le manifeste « Vieux et chez soi ».
  • Enjeu économique avec deux chiffres pour le résumer :
  • 6000 emplois au service des personnes âgées et des personnes handicapées aujourd’hui en Meurthe-et-Moselle, auxquels le département contribue à hauteur de 176 millions d’€,
  • 10 000 créations d’emplois attendus en Lorraine dans les 10 ans à venir dans le secteur de l’aide à

Construire un modèle économique soutenable pour l’autonomie, sans creuser les inégalités entre les personnes, est un défi qui doit nous mobiliser. En Meurthe-et-Moselle, en dépit des déficits récurrents des services à domicile, le conseil départemental a fait le choix d’une prise en charge directe, qui, par conséquent ne se répercute pas sur les tarifs et le reste à charge pour les personnes. C’est un choix politique pour plus d’égalité que nous maintenons mais qui devra trouver d’autres solutions sur le long terme.

  • Enjeu financier enfin : dans un contexte de contraintes budgétaires, le recours aux services numériques permettront – et permettent déjà – de mieux maîtriser des coûts de suivi des personnes, de développer des alternatives à l’hospitalisation ou retarderont sensiblement le moment de l’entrée en établissement spécialisé. J’y reviendrai dans un instant.

L’implication dans une réflexion/expérimentation d’une économie circulaire des aides techniques (dite « technicothèque ») pour les structures d’hébergement, le travail engagé autour du développement d’une filière « silver économie » en Meurthe-et-Moselle, les démarches innovantes en matière d’hébergement à l’image des résidences accompagnées ou les nouvelles formes d’habitat (colocation, cohabitation intergénérationnelle…), les enjeux d’adaptation des logements dans le cadre de la délégation d’aide à la pierre assumée par le département, l’amélioration de l’accès à l’emprunt, l’accompagnement des personnes à la réalisation des travaux sont autant d’opportunités pour l’ambition de notre politique.

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Le vieillissement de la société demande de revoir le financement de l’APA. Plusieurs départements, dont le nôtre, tirent déjà la sonnette d’alarme. Si la baisse du chômage a un impact à la baisse sur les dépenses du RSA, l’augmentation continue de l’APA est, elle, à la fois inexorable et insensible aux variations économiques.

En Meurthe-et-Moselle, nous avons constamment reconnu la responsabilité du département dans le co-financement de l’APA. Néanmoins, la parité originelle s’est progressivement dégradée jusqu’à la revalorisation de l’APA à domicile mise en œuvre par la loi ASV, le gouvernement de Manuel Valls sous l’impulsion de Pascale Boistard a tenu sa parole en abondant sa participation financière pour les 8 000 Meurthe-et-Mosellans bénéficiaires, le reste à charge pour le département est alors descendu à 65 % pour l’année 2017, alors qu’il était de 70 %.

Quant au reste à charge pour le département de la PCH, il représente 75 %.

Derrière ce qui pourrait apparaître comme un débat technocratique se cache en réalité une question de justice sociale et fiscale élémentaire : est-il acceptable que le coût de la solidarité nationale ne soit pas le même partout en France ?

Si la réponse est négative, ce n’est pas seulement la question du financement du RSA qui doit être remise sur la table, c’est celle de l’ensemble des politiques de solidarité.

Il faut repenser et réorganiser la solidarité.

D’abord autour de son socle républicain, celui de la solidarité des droits, garantie par l’Etat, nationale et universelle. Cette solidarité des droits permet l’accès, de tous et partout, à la redistribution fiscale et le cas échéant au versement d’allocations de compensation contre la réalisation des risques sociaux (handicap, vieillesse, maladie, perte d’emploi).

Ensuite, autour d’un pilier, celui de la solidarité d’engagement. Pour enrayer les logiques de destin, il faut mieux prévenir l’apparition des risques sociaux plutôt que de compenser leurs conséquences. La solidarité d’engagement repose sur le principe très simple la proximité avec les personnes et leur situation, autour des collectivités locales et de la société civile. Elle mise sur les ressources et la capacité d’agir de la personne elle-même ainsi que du territoire dans lequel elle vit, de ses acteurs (entreprises, associations, syndicats, …). Pour passer de l’expérimentation à la généralisation, il faudra un approfondissement audacieux de la décentralisation, qui fasse des collectivités locales un espace politique libérant les énergies, notamment par l’adaptation réglementaire. C’est le message que je porterai auprès du président de la République, Emmanuel Macron, le 17 juillet lors de l’audience avec l’Association des Départements de France et auprès du gouvernement qui de déplace au complet, en Meurthe-et-Moselle, cette semaine.

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Pour terminer, je vous précise l’organisation de ce temps de débat autour du Schéma de l’autonomie :

  • Tout d’abord, la vice-présidente Annie Silvestri présentera le rapport
  • Ensuite, présentation de l’avis de la CDCA par les deux vice-présidents, puis discussion et débat
  • Les élus délibéreront en présence des membres de la CDCA à partir de 12h30.
  • Nous déjeunerons avec les membres de la CDCA à l’issue de ce vote.
  • Enfin, je vous précise que les élus départementaux siègeront en commission permanente cet après-midi à partir de 14h30, et que les membres de la CDCA poursuivront leurs travaux à 14h30 dans l’espace J.Baudot.

Je vous remercie.