Aux électeurs d’une gauche déboussolée du Grand Est

Comme beaucoup d’entre vous, j’ai ressenti depuis dimanche de la tristesse, du doute, de la colère. Y compris à l’égard de ma famille politique.

Si, comme une large part des candidats socialistes, ma présence sur la liste de Jean-Pierre Masseret au second tour est un fait juridique, voter pour Philippe Richert est un choix politique.

Car l’heure est à la mobilisation. Le sondage publié hier soir pour le second tour le confirme : la gauche n’a aucune chance de gagner, la droite et l’extrême-droite sont au coude à coude.

Beaucoup de choses s’expriment depuis cinq jours, ici comme ailleurs. Les ressentiments qui se sont accumulés au fil de trente années d’échec à enrayer la montée de l’extrême-droite éclatent au grand jour. Contre la classe politique, contre les décisions d’en haut, contre le gouvernement de gauche, contre l’abandon des territoires, contre l’opposition de droite, contre l’impuissance de la politique.

Toutes ces questions justes sont celles du jour d’après.

Mais, au fait, est-ce bien de l’extrême-droite dont nous parlons encore ?
Faut-il maintenant accueillir sans coup férir à la belle table républicaine celle et ceux qui, pas plus tard que lundi soir encore, se plantaient devant la maison d’une famille de réfugiés pour les montrer du doigt et dénoncer l’accueil de ceux qui fuient la barbarie chez eux ?

Personne à gauche ne veut de ces gens-là au pouvoir. Certains pensent que leur victoire est inéluctable et que mieux vaut les contrer dedans que dehors. Je respecte cette idée, je la trouve simplement en décalage avec la réalité.

Est-ce que notre impuissance à empêcher l’extrême-droite de progresser a rendu celle-ci moins dangereuse ? Nul ne peut le penser sérieusement.

Est-ce que notre arrogance et notre dédain parfois à l’égard de ceux qui choisissent le bulletin d’extrême-droite pour nous botter les fesses, justifient que nous baissions la tête pour accepter son projet funeste ? Ce serait un non sens.

Reconnaissons que nous nous sommes trop contentés de substituer le « F comme fasciste, N comme nazi, à bas le front national » à une sérieuse analyse du projet de l’extrême-droite. Cette paresse doit-elle pour autant nous emmener sur le chemin de la banalisation de ses théories réactionnaires ? Trois fois non.

Pouvons-nous dire demain aux travailleurs frontaliers, aux salariés des entreprises qui vivent des investissements de nos voisins européens ou d’ailleurs : tant pis pour vous si vos emplois sont menacés par les théories anti-européennes et xénophobes l’extrême-droite ? Je ne l’imagine pas non plus.

Je n’ai pas la certitude que voter à droite dimanche dans la Grand Est empêchera la victoire de l’extrême-droite. Si je votais pour la liste sur laquelle je figure, j’aurais cependant le sentiment d’y contribuer. Je n’attends rien en retour, et un peu moins encore à chaque fois que j’entends s’exprimer le président du parti Les Républicains.

Je veux rester concentré sur le seul enjeu véritable du 13 décembre en Alsace Champagne Ardenne Lorraine : ne pas avoir une majorité d’élus d’extrême-droite au sein de l’assemblée régionale.

Malgré la tristesse, le doute et la colère, cet enjeu l’emporte sur tout autre. Voilà pourquoi j’ai choisi de voter pour la liste conduite par Philippe Richert.

Jusqu’à dimanche, c’est mon combat. Rendez-vous lundi pour tous les autres.